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RENCONTRE AVEC : LACRAPS « Je pense que le rap a pour vocation de faire penser les gens. »

L’artiste est un homme de l’ombre. Le terrain il connaît. Pour lui, la célébrité et ses artifices ne sont pas une fin en soit ! Amoureux de son art et des armes qu’il a choisi pour le défendre, LACRAPS, sort aujourd’hui son dernier album intitulé « BOOM BAP 2.0 ». Bien loin des stéréotypes du rappeur sombre et engagé, l’artiste se livre avec passion et sans demi-mesure. RENCONTRE AVEC…

LACRAPS, comment vas-tu ? Pourrais-tu présenter aux lecteurs de SUPERBE MEDIA qui ne te connaitraient pas  ?

Ça va très bien et toi ? Moi c’est LACRAPS, je suis né à Roubaix, mais j’habite à Montpellier depuis plus de 15 ans maintenant. Je suis un ancien du label La Classique avec bientôt six projets à mon actif. Allez cliquer sur les réseaux bande d’enfoirés #ONESTENSEMBLE !

Bientôt 12 ans de rap, car tu as commencé en 2006. Tu es donc loin d’être un novice. Qu’est ce que tu aimes dans cet art ?

Tout ! Penser à ce que je dois écrire, le message que je vais passer, la construction des rimes, les placement sur la prod’ … Tout !

Tu as sorti tes premiers projets physiques en 2016 avec « LES PREUVES DU TEMPS » et « 42 GRAMMES » (avec MANI DEIZ) . De 2006 à 2016 comment as-tu pratiqué ton rap ?

En 2013, j’ai sorti le projet MACHINE À ÉCRIRE en digital, mais les premiers projets en réseau de distribution étaient en effet 42 GRAMMES avec MANI DEIZ et à LES PREUVES DU TEMPS. Avant j’ai fait énormément de freestyles mais également beaucoup de clips avec des collègues, vu que j’effectuais le montage de vidéos à l’époque. J’en ai sorti beaucoup et je pense que ça pris grâce à ça. Les gens ont besoin de vidéos à notre époque.

Tu dis dans tes interviews que tu écoutes de tout dans le rap français. Mais qu’est ce que tu n’écoutes vraiment pas ?

Ceux qui font du rap comique. Je ne vais pas citer de noms, c’est mieux, mais les gens sauront ! Je trouve que ça enlève un petit peu de crédibilité au rap. Après je sais que le divertissement est devenu le truc le plus important dans la vie des gens de nos jours car socialement c’est de plus en plus dur. Donc ça fonctionne ce genre de trucs ! Je pense qu’il y a 20 ans, ça n’aurait pas fonctionné.

Qui sont les artistes rap dont tu te rapproches le plus ?

On me compare souvent à KOOL SHEN. J’aime beaucoup SALIF… J’aime les mecs qui riment fort. En ce moment j’écoute beaucoup JEFF LE NERF et FURAX. Mais j’écoute de tout car si tu regardes ma playlist de douche, il y a dedans LARTISTE feat. CAROLINA, DAMSO… Je m’ambiance aussi de temps en temps. Ça y est je me suis fait avoir !

Tu as dit souvent que le rap c’est « sortir ce qui ne va pas ». Qu’est ce qui ne va pas LACRAPS ?

Il y a beaucoup de choses. Si tu veux savoir tu as juste à écouter mes albums. Avec ce projet je me suis rendu compte que je parlais beaucoup de bavures policières. Les affaires Théo et Amada Traouré m’ont beaucoup choqué. C’est assez incroyable qu’il y est encore une impunité policière de nos jours. Je n’arrive pas à comprendre ! Ça me fait mal !

Tu dis également « Je suis plus pour faire penser que pour faire danser ». Peux-tu nous expliquer cette phrase ?

Je pense que le rap a pour vocation de faire penser les gens. C’est peut-être utopique ! Quand tu écoutes des petits de la rue, ils reflètent la société, ils reflètent ce qu’ils voient dans la rue. C’est donc toujours assez politique qu’on le veuille ou non. La forme peut-être différente, mais le rap reste un art qui revendique. Même ORELSAN qui est pas du tout de la rue,  dit des choses très sensées dans son dernier album. Il ne faut pas être moralisateur, mais donner à réfléchir.

« Y’a trop de mauvais discours dans le rap » est une phrase que tu places assez souvent . Quelles sont pour toi les mauvais discours dans le rap ?

Ceux qui engrènent les petits, c’est tout ! Pourtant j’ai écouté LIM avec des tires comme « A 9 ans déjà » ou encore « Nique lui sa mère » … C’est spécial ! Moi j’ai été bercé avec ça, des trucs plutôt violents et je sais que ce n’est pas forcément la meilleure des éducations quand t’es un petit de la rue. Chez moi je me tenais « droit comme un i » mais dehors je foutais le bordel parce qu’on écoutait les rappeurs. Après je ne pense pas qu’il y est des endroits plus durs que d’autres. La rue est dure partout. 

Tu sembles particulièrement attaché à la qualité et à l’univers de tes prod’ (ton album commence et fini d’ailleurs avec un intro et une outro non rappée) . Tu es un artiste qui rappe sur du « Boom Bap » depuis toujours. Peux-tu nous expliquer ce choix artistique ?

J’aime beaucoup ça. J’ai plus de 30 piges et le « Boom Bap » c’est ce qu’y m’a bercé et j’ai donc logiquement commencé à rapper sur ce genre de prod’. A l’époque, il n’y avait pas autant d’intrus que maintenant. J’ai trouvé des instrumentales sur Youtube et des collègues commençaient à en réaliser. J’ai donc commencé là-dessus. Mais je pense également qu’il faut du temps pour réussir quelque chose, pour le maitriser, donc je continue. Je suis attaché à cette couleur musicale, tout autant que les autres, c’est simplement qu’il faut franchir les paliers petit-à-petit. Donc j’avance.

Quasiment tout le monde rappe sur de la trap aujourd’hui, pourquoi ne pas le faire ?

Parce que faire comme tout le monde n’est pas forcément le choix le plus intéressant à faire. Après quand tu regardes le dernier projet que j’ai sorti, BOOTLEG VOL. 1, il n’y a que deux sons « Boom Bap » dedans. Ce que j’aime faire, je le fais. Je ne réfléchis pas trop. Si je commence à trop réfléchir, ça va commencer à travestir mon truc.

Ton album qui sort s’intitule « BOOMBAP 2.0 ». Que voulais-tu marquer avec ce titre évocateur ?

Il y a les basses que NIZI à travailler de certaines manières, les mixs de LOCO, les refrains auto-tunés… C’est donner une teinte actuelle du « Boom Bap ».

NIZI (producteur) : Avec les titres « 1000 RATURES » et « PAR LE BAS », on est sur un « Boom Bap » différent au niveau de la caisse claire, du choix des drums, des snares 808 retravaillés. Mais également, les voix, la réalisation globale et le mixage finales sont totalement retravaillés. 

Dans le titre « L’ENFER C’EST… » que tu as sorti en avant-première, quel est ton message ?

SARTRE a dit « L’enfer c’est les autres ». Personnellement, je pense que l’enfer est avec soit-même car on est tous responsable de ce qu’il se passe dans nos vies. Rien de très philosophique.

Dans « DES LARMES » , tu dis : « Des fois je m’dis que j’engrène les petits car j’ai tout l’temps un spliff aux lèvres » . Une illustration parfaite de ce que peut-être le rap conscient. Peux-tu nous en parler ?

C’est paradoxale car j’ai très souvent des spliffs dans mes clips mais sans forcément vouloir engrener les petits. Je sais qu’au final ça encourage certains qui m’écoutent à fumer et ce n’est pas forcément une bonne chose. Même si je fume et que je l’assume totalement. Il faut que je fasse attention. Après je ne veux pas changer ma personne pour tomber dans le politiquement correct, ce n’est pas mon but. C’est le genre de sujet et d’actes dont je vais faire attention dans le futur.

Dans « PAR LE BAS », tu dis :«  j’suis entre BOOBA et KOOL SHEN ». Tu peux nous expliquer ?

C’est pour dire que je suis un peu « 4×4 ». Je suis de l’école KOOL SHEN autant que de l’école BOOBA. Même si  je ne suis pas forcement d’accord avec tout ce que dit BOOBA, mais ça c’est un autre débat !

T’a-t’on déjà dit que tu avais une diction et un timbre de voix à la KOOL SHEN ?

Oui on me l’a déjà dit ! Moi je ne trouve pas du tout ! Mais c’est plutôt flatteur. J’aime beaucoup KOOL SHEN ! Un grand big-up à lui ! Il m’a cité chez Nagui en disant qu’il aimait bien ce que je faisais. Un grand honneur !

Dans le bonus-track « WANTED SEEDS », on remarque l’utilisation de la technique du scratch, relativement en rare en 2018. Pourquoi ce choix ?

Parce que ça me plaît ! Je kiffe. C’est comme un musicien en plus. DJ ROLEX sur ce track est vraiment fort. En france, c’est l’un des plus chauds pour moi.

Tu sembles particulièrement attaché à ton style vestimentaire (bob, paire de lunettes de soleil, LACOSTE…). Qu’est ce que tu aimes dans le fait de te saper ?

Déjà qu’on me reconnaisse pas, c’est génial. Quand je vais dans le centre ville de Montpellier, sans casquettes etc… Personne ne me reconnaît ! Après quand je suis en mode casquettes etc… C’est différent ! Pour LACOSTE, lorsque j’étais petit, je voyais tous les grands habillés avec, mais aussi tous les rappeurs. Dans ma jeunesse, c’est une marque que je pouvais pas forcément m’acheter, alors dès que j’ai pu, je l’ai fait ! Maintenant c’est foutu ! J’ai deux armoires remplies uniquement de LACOSTE.

Quelles sont tes 3 marques de sapes françaises préférées ?

J’en citerais deux : LACOSTE et HÉLAS SKATEBOARDING.

En quoi LACRAPS avec « BOOM BAP 2.0 » #CESTSUPERBE ?

Je ne sais pas, ce sera aux auditeurs de le dire ! Dans tous les cas c’est un plaisir d’être là avec vous ! Merci beaucoup, ça tue !

Un dernier mot ? Un message ?

Le 23 mars, allez streamer ça fort bande d’enfoirés #ONESTENSEMBLE ! LACRAPS, Montpellier, merci à SUPERBE MEDIA pour l’interview, c’était au top !

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Propos recueillis par @Hector Sudry Le Dû.

Crédit photos : @Joanà Calas.

Crédit vidéo : @Hendy Harsanto.

LACRAPS BOOMBAP 2.0 #CESTSUPERBE